Le Cinematographe
Le Cinématographe
Le Cinématographe, salle de cinéma à Nantes et Education à l'image

CYCLES ET RÉTROSPECTIVES

La Dame aux camélias


de Mauro Bolognini



RÉTROSPECTIVE ENNIO MORRICONE • JUIN-JUILLET 2015

France, 1981, 1h55, VF
avec Gian Maria Volonte, Bruno Ganz, Isabelle Huppert

La Dame aux camélias
L'histoire fascinante de la célèbre courtisane aimée par Alexandre Dumas fils qui l'immortalisa sous le nom de Marguerite Gauthier. Montée seule à Paris au hasard de ses aventures masculines, Alphonsine Plessis devient prostituée puis courtisane. Mariée à un jeune comte, elle est la maîtresse de Dumas fils qu'elle quitte pour Franz Liszt avant d'être emportée par la tuberculose.


Séances

Mercredi 15/07 21:00
Vendredi 17/07 18:45
Mercredi 22/07 18:30




-

"On voit des extraits de La Dame aux camélias (La storia vera della signora dalle camelie, 1981) de Mauro Bolognini dans deux films, et ce sont deux hommages au génie d’Isabelle Huppert. Dans Les Voleurs de la nuit, tourné en France par Samuel Fuller, le réalisateur américain lui-même regarde le film à la télévision et déclare : « Cette actrice était née pour jouer la dame aux camélias ». Dans un autre film très récent, l’encore inédit et remarquable Bella endormentata de Marco Bellocchio présenté au Festival de Venise cette année, c’est Isabelle Huppert elle-même qui regarde le film à la télévision. Elle interprète une grande actrice très catholique qui vit recluse dans sa maison auprès de sa fille sombrée dans un profond coma, et qui a abandonnée sa carrière pour s’occuper d’elle. Preuves de l’impact qu’ont pu avoir et qu’ont toujours le film de Bolognini et surtout l’interprétation d’Isabelle Huppert, alors à l’orée d’une carrière déjà riche de plusieurs chefs-d’œuvre et grands rôles (La Dentellière, Violette Nozière, Loulou, La Porte du paradis). Fuller a choisi la scène de la mort d’Huppert, qui crache le sang. Bellocchio la montre aux abattoirs boire du sang de vache, pour soigner sa tuberculose. Deux scènes « sanglantes », cruelles, à la fois sublimes et sordides à l’image d’un film qui enregistre le pourrissement d’un corps mais aussi d’un monde malade. Il s’agit d’une production de prestige de la Gaumont Italie qu’on imagine initiée par son patron de l’époque, Daniel Toscan du Plantier, et un véritable écrin pour la jeune actrice. Le choix de Bolognini pour mettre en scène cette nouvelle adaptation du roman de Dumas fils ne surprend guère. C’est le testament artistique d’un spécialiste des adaptations littéraires, mais aussi des reconstructions historiques et du XIXème siècle au cinéma. Le thème de la prostitution traverse son œuvre (on se souvient de La viaccia, Metello, Bubù) mais aussi, plus généralement, de la dimension sociale de la sexualité et de ses pathologies (impuissance dans Le Bel Antonio, inceste dans La Grande Bourgeoise). Bolognini est un esthète fasciné par la décadence et les personnages prolétaires – et parfois bourgeois – brisés par la société. Associé au directeur de la photographie Ennio Guarnieri pour sa période maniériste en couleur, il a magnifié plusieurs actrices internationales mais aucune n’atteint la beauté, la photogénie et l’incroyable expressivité d’Isabelle Huppert dans le rôle d’Alphonsine Plessis, pauvre petite prostituée de province qui deviendra vite l’une des courtisanes les plus prisées de Paris, multipliant les riches amants et vivant une passion amoureuse avec Alexandre Dumas fils, qui s’inspirera de sa vie et sa mort précoce pour le personnage de Marguerite Gauthier dans La Dame au camélias. Le film débute et s’achève par des répétitions et la première représentation de la pièce tirée du roman. La mise en abyme que l’on retrouve dans le film de Bellocchio est donc déjà au cœur du dispositif de mise en scène de Bolognini. Une fois n’est pas coutume, la version longue destinée à la télévision, en deux parties, est supérieure à la version cinéma. Son ampleur romanesque permet à Alphonsine d’exister dans toute sa complexité et son opacité. Huppert est fascinante comme souvent, mais elle est belle et sensuelle comme jamais."
Olivier Père, Arte