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Archives 2001-2011

LE PETIT FUGITIF (LITTLE FUGITIVE)


de Ray Ashley, Morris Engel, Ruth Orkin



PROGRAMMATION FÉVRIER 2009

USA, 1953, 1h20, VOSTF
Avec Richie Andrusco, Richie Brewster, Winnifred Cushing

À Brooklyn dans les années cinquante, la mère de Lennie lui confie la garde de son petit frère Joey, âgé de sept ans, car elle doit se rendre au chevet de la grand-mère, malade. Lennie avait prévu de passer le week-end avec ses amis. Irrité de devoir emmener son petit frère partout avec lui, il décide de lui jouer un tour en simulant un accident de carabine sur un terrain vague. Persuadé
d’avoir causé la mort de son frère, Joey s’enfuit à Coney
Island, immense plage new-yorkaise dédiée aux manèges et à l’amusement. Il va passer une journée et une nuit d’errance au milieu de la foule et des attractions foraines….

New York à hauteur d'enfant
Brooklyn, où vit Joey, et surtout le lieu de son escapade, Coney Island, constituent des personnages à part entière du film. Lieu de divertissement pour de nombreux New-Yorkais des classes modestes, Coney Island est filmée à travers le regard émerveillé d’un enfant de sept ans. Le parc d’attractions et la plage prennent dans Le Petit Fugitif une dimension particulière, presque magique. Comme une image du passé à jamais figée par le cinéma

Coney Island constitue un grand mythe populaire américain du vingtième siècle, chanté par les accents locaux de Lou Reed (Coney Island Baby), immortalisé par les clichés de foule de Weegee, traversé du génie de Buster Keaton dans le seul film où il rit aux éclats (Coney
Island), magnifié en Eastmancolor au début du Mirage de la vie de Douglas Sirk, souvent convoqué dans la grande imagerie américaine pour illustrer les vestiges d’un passé regretté (voir le boardwalk abandonné dans la série Les Soprano, ou le parc d’attractions délabré du jeu-vidéo GTA IV).

Le Petit Fugitif est, en ce sens, un inestimable témoignage de son époque. Coney Island n’a jamais été aussi fréquentée que dans les années cinquante et véhicule, par son seul nom, toute la mythologie des fifties. C’est un temps où l’on allait en masse y profiter des beaux jours et de ses attractions vertigineuses (comme le Parachute Jump), où les enfants pouvaient passer la journée à ramasser les bouteilles usagées de Coca qui – récupérées pour quelques cents – leur permettaient de s’offrir des tours de manège. Le tournage en caméra (pratiquement) cachée a permis à Morris Engel d’immortaliser cet endroit unique auquel les New-Yorkais
restent extrêmement attachés, comme le montrent les mouvements actuels en faveur de la préservation du parc d’attractions, menacé de destruction car il n’est plus aux normes de sécurité.

Un chef d'œuvre américain aux premiers temps d'une vague nouvelle
Son traitement novateur de la peur et de l’émerveillement enfantins ont valu au Petit Fugitif une nomination aux Oscars®, dans la section « Meilleur scénario », et un Lion d’argent à Venise en 1953 partagé avec le prestigieux Les Contes de la lune vague après la pluie de Kenji Mizoguchi. Le Petit Fugitif fait également partie de la liste des 1000 films élus comme incontournables par le New York Times, et se classe parmi les meilleurs films sur New York selon Time Out.

Le dispositif de création du Petit Fugitif mélange documentaire et fiction, et marque la naissance d’un nouveau cinéma indépendant américain. En cela, il ressemble dans sa fabrication aux films urbains et fauchés de l’époque tels que The Savage Eye (Meyers,
Maddow et Strick, 1956-60) ou Shadows (Cassavetes, 1959).

Le Petit Fugitif a suscité l’admiration de grands cinéastes, dont notamment ceux de la Nouvelle Vague française qui y virent l’exaltation d’une liberté de filmage et d’une justesse de ton jusqu’à présent inexplorées par le cinéma traditionnel. François Truffaut, en particulier, a encensé Le Petit Fugitif dans une célèbre interview donnée au New Yorker. Le film lui a servi d’influence pour Les Quatre cents coups, dans lequel il a explicitement rendu
hommage au modèle original lors d’une séquence qui montre le jeune Antoine Doinel en train de se laver le visage après son escapade, reprenant ainsi un geste effectué dans les mêmes circonstances par le petit Joey.

De même, Jean-Luc Godard, séduit par le dispositif utilisé pour le tournage du Petit Fugitif, a voulu acheter la caméra conçue par Morris Engel. Il s’inspira des techniques élaborées par Engel pour tourner, dans Paris, des plans volés de foule, des images cachées de la vie urbaine. Le film qui en résulta s’appelle À bout de souffle.

Extraits du dossier de presse


SEANCES

Mercredi 11 février à 14h30
Dimanche 15 février à 18h30
Mardi 17 février à 15h
Vendredi 20 février à 20h30
Mardi 24 février à 20h30