Le Cinematographe
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Le Cinématographe, salle de cinéma à Nantes et Education à l'image

CYCLES ET RÉTROSPECTIVES

La Scandaleuse de Berlin (A foreign affair)


de Billy Wilder



RÉTROSPECTIVE MARLENE DIETRICH • AOÛT-SEPTEMBRE 2013

USA, 1949, 1h50, VOSTF
avec Marlene Dietrich, Jean Arthur, John Lund, Millard Mitchell


La Scandaleuse de Berlin (A foreign affair)
La très austère Phoebe Frost est envoyée à Berlin en 1946 pour enquêter sur la moralité des troupes américaines d'occupation. Elle ne découvre que marché noir et relations amoureuses entre soldats et jeunes Allemandes. Pis, une chanteuse de cabaret opportuniste, au passé nazi, est protégée par un officier américain, celui-là même qu'elle avait chargé de l'enquête de départ...

Qui d'autre que Billy Wilder aurait eu l'audace de demander à Marlene, toujours aussi somptueuse, de jouer une ex-nazie planquée (rôle qu'elle a d'ailleurs hésité à accepter) et de choisir une ville martyre comme décor. En ruines, en cendres, le naturalisme des plans de Berlin (filmés en 1947, avant le tournage) apporte une profonde gravité au film.

"L’un des morceaux de bravoure de ce classique est l’interprétation par Marlene de la fameuse chanson Black market. Or, il n’y a pas que le marché qui soit noir dans cette satire du Berlin de l’après-guerre : voir le propos et l’humour afférent. Lors de la magnifique scène d’ouverture, un avion vole au-dessus de la ville ravagée par les bombes, évoquant “un immense fromage rongé par les rats”. La mécanique comique imaginée par Charles Brackett et Wilder sera ainsi sous-tendue par une description presque documentaire de Berlin en 1948. A bord de l’avion, une commission menée par la puritaine député Phoebe Frost (Jean Arthur) vient surveiller la “moralité” des troupes américaines. Dès qu’il s’agit de moralité, on imagine la position de Billy Wilder. Ici, il renvoie dos à dos l’Allemagne post-hitlérienne et l’Amérique des pactes politiques et militaires. Le choc comique de la rencontre de deux civilisations est d’ailleurs récurrent dans sa filmographie, et on peut avancer que c’est pour des raisons toutes personnelles puisque lui-même n’a cessé de faire le va-et-vient entre ces deux cultures. Ce hiatus est cristallisé ici par la liaison entre un capitaine américain (John Lund) et une chanteuse au passé nazi, Erika von Schlütow (Marlene Dietrich, plus que jamais en phase avec son nom tel que commenté par Cocteau : “commence comme une caresse et finit comme un coup de cravache” ). Marché noir : il lui apporte des bas et la protège. Elle le dédommage de ses cadeaux sur un matelas qu’il vient juste d’échanger contre le gâteau d’anniversaire envoyé par sa fiancée. On l’aura compris, le thème central est la manipulation. Aucun des personnages n’échappe à ce piège. Même Erika, la garce glamour, sert de couverture à un ancien nazi, et finira reconduite dans un camp de travail (en demandant à ses geôliers de la porter à cause de la boue). On pourrait inventorier les bons mots (un seul pour la route : “Le jour où le gaz a recommencé à marcher, on a dénombré 160 suicides, rien qu’à Berlin” ), mais il ne faut pas oublier le génie de la mise en scène. Ainsi la séquence dans une salle d’archives où le capitaine fait une déclaration d’amour à la député. Elle se protège en tirant des tiroirs de dossiers entre elle et son interlocuteur. Mais il les referme un à un et finit par la coincer."
Olivier Nicklaus, Les Inrockuptibles

Séances

Lundi 2 septembre 2013 à 18h45
Vendredi 6 septembre 2013 à 21h30
Lundi 9 septembre 2013 à 21h