Le Cinematographe
Le Cinématographe
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FILMS DU PATRIMOINE • GRANDS CLASSIQUES

Bertha Boxcar

de Martin Scorsese



États-Unis, 1972, 1h28, VOSTF
avec Barbara Hershey, David Carradine
NUM • VERSION RESTAURÉE

Bertha Boxcar
Pendant la crise de 1929, parce que son père vient de mourir accidentellement sous ses yeux, la jeune Bertha part sillonner le sud des États-Unis à bord de wagons de marchandises, "boxcar" en anglais américain.

Deuxième long-métrage de Martin Scorsese, ce film répond à une commande de Roger Corman, incontournable producteur de série B, cinéaste et découvreur de talents. Parfois considéré comme mineur dans l’œuvre du réalisateur, il contient pourtant en germes les motifs du cinéma de Scorsese,
et notamment la violence, tout en se pliant aux contraintes des films d’exploitation : petit budget, poursuites, brutalité et scènes dénudées.

Il y a évidemment du Bonnie and Clyde (Arthur Penn, 1967) dans le couple formé par Bertha (Barbara Hershey) et Big Bill Shelly (David Carradine), un ouvrier des chemins de fer avec qui s’associera la jeune femme par amour et pour survivre. Cependant avec Bertha Boxcar, Corman imagine poursuivre dans la veine des femmes gangsters après son Bloody Mamma (1970).

Rares sont les femmes dans les récits de hobos et bien que Bertha voyage avec trois hommes le film reste centré sur son personnage fort, fait exceptionnel chez Scorsese. Elle ne veut plus d’une vie de misère et explique son programme à Bill "guts and luck" : du cran et de la chance ! Barbara Hersley livre une interprétation lumineuse de ce personnage qui semble se préserver de la dure réalité par un écran invisible. Drôle de bande que ces quatre-là : une jeune femme libre et déterminée, un syndicaliste acharné, Rake un yankee joueur de cartes (et tricheur), Von un collègue noir du défunt père de Bertha… qui s’entraînent mutuellement dans le banditisme pour lutter contre les inégalités et par détestation des nantis. Le film avance avec des ellipses parfois peu évidentes et passe d’un registre à l’autre, humour, action, violence aussi brutale qu’inattendue. Déjà la composition magistrale de certaines scènes est en place. Scorsese pose sa caméra là où on ne l’attend pas. Le montage est nerveux et la musique tantôt rock country, tantôt blues accompagne la folle course des parias braqueurs de train. Si on a parfois la sensation que certaines séquences se répètent, ce n’est pas seulement en raison du budget limité imposé par la production ; cette impression de déjà vu contribue à entraîner les protagonistes vers leur fin tragique et implacable. La scène est d’ailleurs annonciatrice de La dernière Tentation du Christ (1988) dans lequel Barbara Hersley interprètera Marie-Madeleine…

Aujourd’hui, dans l’imaginaire collectif, toute référence à la Grande Dépression convoque quasi immédiatement des images des Raisins de la Colère (John Ford, 1940). Scorsese, dont la cinéphilie est célèbre – en atteste la scène où Bertha seule et ne sachant où dormir s’attarde devant un cinéma – rejoue ici la référence avec une dimension supplémentaire. Dans le film de Ford, le comédien John Carradine jouait Casy, grâce à qui son compagnon Tom Joad découvrait la solidarité et la nécessité de lutter. Le même comédien – qui est aussi le père de David Carradine – devenu ici Sartoris, le patron de la compagnie de chemin de fer, se permettra de vilipender Bill Shelly exprimant sa déception de découvrir un simple voleur alors qu’il le prenait pour "une sorte de bolchevik". Pourtant, c’est toujours du côté du partage que Shelly envisage les braquages, pas toujours du goût des syndicalistes qui lui reprochent de donner une mauvaise image d’eux en s’acoquinant avec des noirs et des putains !

La puissance dont les quatre complices jouissent dès lors qu’ils sont armés les exalte de toute évidence davantage que l’enrichissement personnel. Dans ce road movie à la tonalité initiatique, la toute jeune Bertha du plan d’ouverture quittera sa chrysalide, mais une fois perdu son regard d’enfant, elle ne réussira plus à se hisser dans le wagon après lequel elle court.

Séances

BOUGUENAIS • Cinéma Le Beaulieu
Mer 09/10/2019, 20:00

SAINT-ÉTIENNE-DE-MONTLUC • Montluc Cinéma
Mar 15/10/2019, 20:45

CAMPBON • Cinéma Victoria
Mar 12/11/2019, 20:30

LA TURBALLE • Cinéma Atlantic
Lun 02/12/2019, 20:45

LE POULIGUEN • Cinéma Pax
Mar 03/12/2019, 21:00

SAINT-MICHEL-CHEF-CHEF • Cinéma Saint-Michel
Lun 06/01/2020, 20:30

LA MONTAGNE • Cinéma Le Montagnard
Jeu 06/02/2020, 20:30

VERTOU • Ciné-Vaillant
Jeu 12/03/2020, 20:00

SAINTE-MARIE-SUR-MER • Cinéma Saint-Joseph
Jeu 12/03/2020, 20:30

ANCENIS • Cinéma Éden 3
Mar 19/05/2020, 20:30