Le Cinematographe
Le Cinématographe
Le Cinématographe, salle de cinéma à Nantes et Education à l'image

CYCLES ET RÉTROSPECTIVES

Les Frissons de Midi-Minuit


Programmes de courts-métrages



REVUE MIDI-MINUIT FANTASTIQUE • MARS 2022

NOVICIAT
NOVICIAT

Programme #1

Noviciat de Noël Burch ( (France, 1965, 17 min)
Deuxième prix ex-aequo derrière Scorpio Rising de Kenneth Anger au Festival d’Évian en 1965, rétif à la notion de genre, Noviciat est un sommet d’étrangeté par son traitement singulier d’une obsession : la fascination d’un homme pour une femme qui le voit tomber en son pouvoir jusque dans les derniers retranchements de la servilité. Le film a suscité moult interprétations politiques. Mais Noviciat, c’est sans doute d’abord une déclaration d’amour viragophile à une femme aperçue à la dérobée, Frédérique Franchini, qui tenait une école sous les fenêtres de l’appartement du réalisateur Noël Burch à Paris, et à qui il a offert le rôle féminin principal de son film. Un « phantasme » revendiqué, qui offre de nouvelles aventures SM à cette figure chère à MMF qu’est Peeping Tom, et qui réinvente la Vamp fantastique en la personne d’une sévère professeur de ju-jitsu.

Liberta, agent spacial anti-mythe de Jean-Noël Delamarre ( (France, 1971, 25 min)
Réalisé par Jean-Noël Delamarre, un fidèle de Jean Rollin, Liberta documente un trésor perdu inestimable : le décorum éphémère des salles de quartier parisiennes, toiles peintes réalisées par Publi-Décor. Réalisé en banc-titres, le film transcende son objet en narrant les aventures de Liberta – nom générique de ces belles violentées ou insatiables tigresses récurrentes – confrontée aux grands monstres classiques. Dialogué par Loro et de Beketch (Pilote), le film navigue entre humour libertaire, situationnisme et psychédélisme. Miroir fascinant du cinéphile qui hésite entre deux devantures de cinéma et se crée ainsi des chimères filmiques, Liberta est la matérialisation des rêveries du midi-minuiste, ce promeneur solitaire sur le boulevard du crime et du plaisir.

Chronique de voyage de Robert de Laroche ( (France, 1971, 26 min)
Chronique de voyage est le passage à l’acte d’un jeune fou de fantastique biberonné à la lecture de MMF, Robert de Laroche. Un peu à la manière de Fantasmagorie qui inventait une Transylvanie val-d’oisiennne, le décor naturel d’Hellenvilliers offre l’insolite du château, du cimetière et de la brume hivernale qui sied à cette déclaration d’amour aux vampires. Le noir et blanc onirique, le rythme hypnotique, la musique minimaliste autorisent des fulgurances : ainsi ce travelling arrière quand le voyageur passe les grilles du domaine, plan sublime qui réinvente le célèbre intertitre : « Une fois franchi le pont, les fantômes vinrent à lui. » Lotte Eisner, amie de Fritz Lang et contemporaine de Murnau, s’enthousiasma pour ce lointain héritier des cauchemars expressionnistes.

Ténèbres de Claude Loubarie (France, 1971, 12 min)
Pas de fausse pudeur : Ténèbres est un véritable ovni au sein du midiminuisme sur grand écran, un film stupéfiant dans le contexte français, et une œuvre en avance de 10 ans sur le fantastique transalpin de Lucio Fulci ! Décédé d’un suicide après souffert de délires de persécutions extraterrestres, Loubarie a peut-être finalement livré ici une sorte de cauchemar autobiographique : le récit d’un homme inexorablement happé par un au-delà de zombies putréfiés...

Programme #2

Insomnie de Pierre Étaix (France, 1963, 15 min)
Maître français du slapstick, Pierre Étaix s’est vite imposé comme l’un des héritiers de Chaplin et de Keaton. Mais, chose moins connue, il était aussi un fantasticophile fervent, un adorateur du Cauchemar de Dracula, des Proies du vampire, et un assidu des salles de quartier. Une passion partagée avec Jean-Claude Carrière, son coscénariste sur Insomnie, dernier court métrage de l’auteur de Yoyo. Étaix y révèle, quatre ans avant Le Bal des vampires, la réversibilité du rire et de l’horreur, s’autorisant audaces formelles, splendeur gothique et virtuosité du découpage. MMF, dans son n° 17, célébra le film pour son refus de toute parodie, et sa filiation évidente avec la grande tradition du genre, de Browning à Fisher : bref, comme une pépite à inscrire au panthéon du cinéma des vampires.

La Maison du juge de Serge Fouquet (France, 1963, 26 min)
Le plus obscur de tous les films midi-minuistes... La Maison du juge est une adaptation de la nouvelle horrifique éponyme de Bram Stoker (Dracula), dont Fiction venait alors d’offrir la toute première traduction en 1963. Sélectionné au Festival du film libre en 1965, le film, dont le réalisateur de vingt ans avait déjà été défendu par MMF pour Coq à Sery, enthousiasma Jean Boullet et toute la jeune garde midi-minuiste avant de tomber dans l’oubli des décennies durant. Peut-être en raison même de son tournage amateur et de ses défauts techniques évidents (image sous-exposée, postsynchronisation approximative), La Maison du juge atteint un niveau d’étrangeté sidérant. Entre hommage à la Hammer et ovni d’une époque indéfinissable, le film de Serge Fouquet s’impose comme un cauchemar vénéneux.

Éves futures de Jacques Baratier (France, 1964, 16 min)
« Un poète ne pense pas, mais s’exprime directement avec des mots, des couleurs, des sons », théorisait Jacques Baratier. Voilà résumé Eves futures, qui transcende son propos (la confection des mannequins de vitrine) en un poème fétichiste où se brouille la frontière entre vie et artifice. Eves se prête à toutes les lectures : érotomanie, critique du consumérisme, métaphore du travail du cinéaste... « Nous ne sommes rien, tout n’est qu’illusion », précisait Baratier, dont le spleen dû à cette prise de conscience irrigue tout le film, décuplé par la musique de Georges Delerue. MMF ne ratait jamais une occasion de célébrer le réalisateur pour son art d’un fantastique libéré des contraintes du genre. Follement beau, Eves futures est un passage secret entre l’épisode After Hour de La Quatrième Dimension et les déchirantes révélations du Silencio Club de Mulholand Drive.

De mes amours décomposées de Jacques Zimmer (France, 1970, 10 min)
Midi-minuiste de l’extérieur (La Revue du cinéma) mais de cœur, ami proche de Caen, Romer, Boullet et Losfeld, Jacques Zimmer réalise avec De mes amours décomposées un film libre et personnel, uniquement conçu pour évoquer ses auteurs favoris (Sade, Lautréamont, Baudelaire, Lovecraft) et la bande dessinée fantastique dont cet amateur de sexe et de sang sait percevoir les beautés (celle des éditions Warren et du Terrain vague). Un film à la fois sombre et joyeux, sur l’amour et la mort, non narratif, qui s’impose comme un alliage fascinant entre le trivial du moment, l’épouvante Sixties, et ce qu’il y a alors de plus noble dans la culture, la poésie du XIXe siècle. Véritable manifeste du midi-minuisme sur grand écran, De mes amours décomposées fut salué, outre MMF, par Alain Robbe-Grillet, saisi par l’audace du film.

Dracula de Jean Boullet (France, 1963, 9 min)
Le plus mythique des films midi-minuistes ! Peu après sa rupture avec MM, Jean Boullet se lance dans le projet fou d’une adaptation en ombres chinoises de Dracula. En résultent des images sublimes, parfois dans l’héritage de Cocteau, et qui toujours tiennent de l’invocation magique.

Séances • Mars 2022

- - samedi 19/03 18:45 (Programme #1) - - samedi 19/03 21:00 (Programme #2)

> Chaque séance est présentée et animée par Nicolas Stanzick, journaliste et musicien

> Projections précédées d'une signature du Volume 4 de "L'Intégrale Midi-Minuit Fantastique" par Nicolas Stanzick dans le hall du cinéma de 16:00 à 18:00, en partenariat avec la librairie La Vie devant soi.

Plus d'informations : www.midiminuitfantastique.com