Le Cinematographe
Le Cinématographe
Le Cinématographe, salle de cinéma à Nantes et Education à l'image

CYCLES ET RÉTROSPECTIVES

Eva


de Joseph Losey



CINÉMA D'HIER ET AUJOURD'HUI • JANVIER-FÉVRIER 2015

GB, 1962, 1h49, VOSTF
avec Jeanne Moreau, Stanley Baker, Virna Lisi, Giorgio Albertazzi
VERSION RESTAURÉE

Eva
Tyvlan Jones est un menteur qui s’est bâti une réputation d’écrivain grâce aux ouvrages de son frère. Arrivant à Venise, il rencontre Eva dont il tombe amoureux. Mais cette dernière a choisi de vivre une vie indépendante, se refusant à aimer et ne voulant pas être aimée. Tyvian se marie à une autre femme mais aime toujours Eva. "De Monsieur Klein à The Servant, le réalisateur a toujours questionné l’identité de ses protagonistes au croisement entre origines et pays divers et variés. Dans Eva, c’est une femme qui confronte le spectateur face à son mystère et celui d’une ville : Venise." Oscar Duboy, Critikat

Séances

Mercredi 18/02 20:30
Vendredi 20/02 20:30
Dimanche 22/02 14:15
Lundi 23/02 18:30
Mercredi 25/02 20:30


Bande annonce


Eva est un film qui n’a pas eu de chance. C’est une oeuvre à laquelle la volonté des producteurs-distributeurs a donné un autre visage, la bande-son ayant été resynchronisée, des coupes ayant dénaturé le rôle dramatique de la musique.

"C’est le film le plus personnel, le plus passionné que j’aie tourné. Toutes ces passions s’exprimaient par le rythme. Et quand on a changé la bande-son, on a détruit le rythme, donc le lyrisme. Dans Eva le rôle de la musique était primordial. Elle exprimait le cri d’angoisse de l’homme et de a femme, un cri qui venait d’Adam et Eve."
Joseph Losey

"Losey nous invite à la quintessence de l’analyse psychologique au cinéma. Chaque geste, chaque regard, chaque élément de décor renvoient à des structures profondes de chacun des personnages. C’est dire que la lecture du film demande un effort constant, et qu’Eva apparaît comme l’une des oeuvres les plus difficiles de Losey. Il ne s’agit pas d’ésotérisme. Non. Simplement d’un travail d’approche de chaque instant, d’une découverte par l’intelligence.
(…) La difficulté de ce film vient donc de ce que les personnages ne sont pas donnés d’emblée. Ils ne se définissent pas par eux-mêmes mais par rapport au personnage avec qui ils sont en conflit. Chaque personnage est vu à travers l’autre. Et ce conflit, Losey,le place à un niveau de réflexion très élevé. Ce n’est pas seulement un conflit de situations, ou de classes. Mais le conflit fondamental, originel entre l’homme et la femme au sens le plus abstrait, le plus général qui soit. Le problème de la coexistence sexuelle et matrimoniale.
"Je voulais affirme Losey, montrer le "comment" des relations entre un homme et une femme. Un homme conditionné par une éducation puritaine, et une femme française ; je voulais montrer les changements de rôles fréquents chez un couple, une femme qui décide de son comportement de façon virile et un homme qui a surtout peur de montrer sa faiblesse. Lorsqu’on regarde autour de soi, parmi ses amis, même parmi les gens conscients de ce qu’ils sont combien de mariages ratés ne trouvons-nous pas ?" La difficulté pour saisir le personnages est encore plus grande, quand on voit que Losey en fait des exilés par rapport à eux-mêmes.
"Venise, dit Losey, est une ville où l’on va se cacher. C’est une ville triste sous la pluie d’hiver, presque préhistorique, et c’est le symbole freudien de l’eau. Je ne voulais pas tourner tout le film à Rome, car on m’aurait accusé de refaire La Dolce Vita. Je préférais opposer l’horreur de leur liaison à la beauté de Venise." Pour Losey, l’eau est le symbole sexuel, le plus plus évident. Et Venise, c’est la ville du reflet. Reflet dans l’eau, dans les miroirs, dans les verres… "Les reflets dans Eva, constituent un renversement, une tentative délibérée de faire pivoter le spectateur par rapport à sa position réelle dans l’espace. Mais il représentent aussi un renversement des sexes : quand le principe féminin chez l’homme (ou le principe masculin chez la femme) est plus accusé qu’à l’ordinaire ou que les rôles sont même tout à fait renversés en ce qui concerne leur position sexuelle."
Raymond Lefèvre, Joseph Losey, l’homme et son œuvre, Images et son